Pourquoi la croissance ?
La croissance économique est un sujet fédérateur. A part quelques
écologistes radicaux et anarchistes, le spectre politique tout entier
s'accorde pour dire qu'il faut de la croissance, que les mesures
politiques à prendre doivent avoir pour objectif "le retour à" ou (dans
les cas heureux) "l'accélération de", la croissance. Pourquoi cela,
pourquoi la croissance est-elle tant désirable, pourquoi ni la gauche,
ni la droite, ni aucune force politique sérieuse, ne conçoivent pas de
faire sans ?
Parce que, pour paraphraser Sting, nous aimons tous nos enfants ... nous voulons pour eux un avenir meilleur que ce que nous avons connu ...
Nos
sociétés sont contraintes par leur taille qui impose des modes de
gouvernement par représentation. Des lors, les représentants sont
obligés d'agir informés par des "vérités statistiques" - lorsqu'il
s'agit de décider, de trancher, on ne peut que très rarement accommoder
la diversité des valeurs humaines. Pour certains, un meilleur avenir
veut dire un air plus propre et plus d'étendues vierges; pour d'autres,
plus de temps pour voyager, pour goûter à l'art et à la création; enfin,
pour beaucoup, un meilleur avenir se traduit par pouvoir aller faire
des courses sans être obligé d'avoir tout le temps en tête le total de
ce que l'on a déjà mis dans le caddy pour déduire la somme dont on
dispose encore ... Nos représentants, soient-ils de gauche ou de droite,
ont comme première mission de nous encourager à continuer à vivre
ensemble. Mais si nous devons vivre ensemble, alors il faut trouver une
façon de réconcilier des objectifs qui le sont parfois difficilement. Et
lorsque cela s'avère impossible, lorsqu'il faut trancher, c'est bien la
majorité qui l'emporte, au nom d'un principe communément accepté
d'égalité entre tous les hommes - si une opinion ne pèse pas plus qu'une
autre, si nous sommes deux à la partager, nous l'emportons sur celui
qui est tout seul.
La croissance économique signifie
"plus". Plus de biens matériels (mais aussi culturels et spirituels);
plus de services. Nous arrivons à conclure que si, indéniablement, une
majorité traduit "un meilleur avenir pour nos enfants" par "plus de
biens matériels, culturels et spirituels et plus de services pour nos
enfants", la croissance s'impose, à gauche comme à droite, comme la
seule réponse possible et le signe clair que notre système de
gouvernance fonctionne plutôt bien puisque nos représentants nous
obéissent.
La croissance devient d'autant plus
nécessaire lorsque nous réalisons qu'il ne s'agit pas simplement de
(mieux) partager les biens que nous possédons déjà. Déjà, parce qu'il
n'existe pas de bien d'une durée d'utilisation infinie - tout bien
matériel à une durée de vie limitée et ensuite il faut le renouveler, en
produire un autre. L'enrichissement culturel et spirituel n'est pas
envisageable si nous nous contentons des œuvres d'art produites jusqu'à
un moment donné et cessons ensuite de créer ! De plus, les services
sont éphémères - ils sont consommés au fur et à mesure qu'ils sont
crées, ils ne possèdent pas de substance transmissible. Sans parler de
notre empathie et pouvoir de compassion pour ceux qui n'ont presque
rien, les pauvres près de chez nous comme les pauvres de loin, auxquels
nous aimerions bien donner la possibilité de jouir d'au moins un minimum
de confort matériel.
Pour ce faire, il faut produire,
des biens et des services, et de plus en plus - il y a encore des
pauvres dans nos pays, des pauvres qui n'ont pas de logement - il faut
en construire plus. Il y a encore des pauvres européens, qui partagent
tant avec nous, au niveau historique, culturel, des citoyens qui ont
tout le droit de vouloir travailler honnêtement et s'en sortir par le
travail, qui ont tout le droit de vouloir un meilleur avenir pour leurs
enfants. Il y a ensuite plusieurs centaines de millions de chinois dans
la pauvreté, qui ont vu des centaines de millions de leur compatriotes
acquérir un niveau de vie décent grâce au travail. Et il y a encore pas
loin d'un milliard d'indiens, pakistanais et bangladeshis et près d'un
demi milliard d'africains à sortir de la pauvreté. C'est bien notre
capacité à nous émouvoir pour eux qui nous rend humains.
Si
nous voulons un meilleur avenir pour nos enfants, mais aussi pour tous
nos frères humains, le partage ne peut pas suffire. La croissance
économique est la solution.
0 Comments:
Post a Comment
<< Home